Pour une gestion publique de l'eau à laquelle les usagers-citoyens puissent comprendre quelque chose...

mardi 28 octobre 2008

Jacques Perreux interpelle André Santini



Jacques Perreux
Vice-Président du Conseil Général du Val de Marne
Chargé de l’eau, de l’assainissement
Des énergies renouvelables
Et du développement durable


Monsieur Santini doit respecter le temps nécessaire à la démocratie


C’est en janvier 2011 que le contrat liant le Syndicat des eaux d’Ile-de-France (Sedif), à Veolia depuis 1923 arrive à expiration. Les délégués de 142 communes de la banlieue parisienne, représentant 4 millions d’usagers franciliens, vont devoir choisir le futur mode de gestion. Le secrétaire d’Etat ultra-libéral qui préside le Sedif depuis 24 ans, M. André Santini, veut aller vite, très vite pour que la décision soit prise dès décembre 2008 ! Cette précipitation cache mal une inquiétude autour du renouvellement du plus important contrat européen de Veolia ..

En effet, les élus et les citoyens plébiscitent de plus en plus clairement une gestion publique et transparente de l’eau! C’est vrai à Atlanta et New Delhi, où les tentatives de privatisation ont été abandonnées suite à de fortes mobilisations populaires. C’est vrai à Bruxelles et à Madrid, où la gestion est revenue au public. En France, de nombreuses collectivités comme le Conseil Général du val de Marne font la démonstration de la qualité d’une telle gestion. De plus ces dernières années, une cinquantaine de villes sont passées en régie publique. Le maire de Paris va créer en 2009 un opérateur public de l’eau. Au Conseil d’Administration du Sédif lui-même, pour la première fois, la gauche a présenté en mai dernier, face à Monsieur Santini, un candidat s’engageant sur le retour en régie, qui, en dépit de quelques hésitations et défections a obtenu près de 40% des voix.

Une coordination rassemblant élus, associations et usagers partisans de la gestion publique en région parisienne anime le débat dans de nombreuses villes d’Ile-de-France.

L‘eau a besoin de citoyenneté.

Comment ce don de la nature, qui n’appartient à personne en particulier, pourrait-il rester un bien commun s’il n’est pas géré en commun, et qu’il est délégué, à fortiori à des actionnaires ?
L’eau est inter-dépendante. Nous n’avons qu’une seule et même eau, comme nous n’avons qu’un seul soleil. Se comporter bien ou mal quelque part sur la planète aura des incidences ailleurs sur la planète. L’eau nous demande donc d’être solidaires, de penser à l’autre. Ce n’est pas la préoccupation majeure des membres des conseils d’administration des multinationales de l’eau.

L’eau que nous buvons est la même depuis la nuit des temps. Elle nous demande donc de penser à ceux qui nous succèderont, en la protégeant, en l’économisant. Mais dans les conseils d’administration des multinationales de l’eau, le retour sur investissement l’emporte sans coup férir sur le développement durable et le respect de la biodiversité.

L’eau est une grande cause humaine. Les usagers et les collectivités locales sont appelés à mettre la main à la poche. On prévoit de dépenser des milliards d’euros dans les toutes prochaines années pour atteindre le bon état écologique et chimique des rivières. On parle du doublement de la facture de l’eau en 10 ans, et les seuls qui ne contribuent pas à l’effort, mais au contraire en profitent, sont les actionnaires de l’eau !

L’UFC Que-Choisir parle pour le Sedif de « sur-profits » exorbitants de 90 millions d’euros chaque année. Deux remarques : il est avéré en France que l’eau potable est toujours moins chère, d’environ 30%, lorsqu’elle est produite par une régie publique que lorsqu’elle est confiée à une entreprise privée. Ceux qui considèrent l’eau comme une marchandise ne sont donc pas compétitifs sur le marché.

A l’heure où l’Europe devrait abandonner toutes les activités humaines à une « concurrence libre et non faussée », dans le domaine de l’eau les entreprises ne se font pas vraiment concurrence. C’est plutôt le partage… du gâteau. A Paris, la Lyonnaise des eaux régne sur la rive gauche de la Seine, Veolia sur la rive droite. La société des Eaux de Marseille, dont le capital est constitué à 50% par Veolia , 50% par la Lyonnaise, domine toute la région méditerranéenne.

Le Conseil de la concurrence a observé que le délégataire en place est souvent seul à présenter une offre à l’expiration d’un contrat. Autant dire que dans le domaine de l’eau, la concurrence n’est pas vraiment libre, et qu’elle est plutôt faussée.

On connaît la propension de Monsieur Santini à tout déléguer au privé, y compris la gestion des ressources humaines dans la ville dont il est maire. Un homme qui cumule beaucoup de fonctions : outre sa mairie, son secrétariat d’Etat, le Sedif, il préside aussi le Comité de bassin de l’Agence de l’eau Seine Normandie. Son Vice-président n’est autre que M. Paul-Louis Girardot, président du comité de surveillance de … Veolia.

Une mésaventure survenue cet été en dit long sur le mélange des genres. Le ministre président Santini a écrit a tous les élus du Sedif sur papier à en tête de… Veolia, pour s’en excuser un mois après. Certes l’erreur est humaine, mais celle-çi en l’occurrence trahit plutôt la confusion, la fusion, voire les effusions, entre certains élus et le secteur privé.

Tout cela n’est ni raisonnable ni prudent.. Le devoir de précaution doit s’imposer. Citoyens et élus ont besoin de temps pour se réapproprier une gestion de l’eau qui leur a échappé.

Monsieur Santini veut aller trop vite. Il faut pouvoir réfléchir tranquillement, avoir tous les éléments en main, confronter les options... Tout cela demande du temps. C’est le temps de la démocratie et de l’intérêt général.


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