Pour une gestion publique de l'eau à laquelle les usagers-citoyens puissent comprendre quelque chose...

dimanche 10 avril 2011

Encore une Communauté d'Agglo face au choix de la régie !

Anne Le Strat, madame « eau » de Paris, a défendu la régie publique à la CALL.

(Communauté d'agglo de Lens-Liévin)

Samedi 09.04.2011, 05:16 - La Voix du Nord

L'heure du choix approche... Au mois de novembre, les élus de la Communauté d'agglo de Lens- Liévin vont décider de reconduire le contrat de la multinationale Veolia ou de passer en régie de service public. Depuis plusieurs mois, l'association Eau Secours 62 tente de convaincre les élus de gérer l'eau en régie. Anne Le Strat, conseillère municipale du 18e arrondissement de Paris et présidente d'Eau de Paris est venue hier au siège de la CALL, témoigner de l'expérience parisienne. Le message qu'elle est venue transmettre ? Que la gestion publique de l'eau, ça marche ! Et que si Paris l'a fait, la CALL peut le faire.

lens@info-artois.fr

 Cheville ouvrière du retour de l'eau en régie depuis 2001, A. Le Strat a témoigné de l'expérience parisienne.

Cheville ouvrière du retour de l'eau en régie depuis 2001, A. Le Strat a témoigné de l'expérience parisienne.

Hier matin, 10 heures, siège de la Communauté d'agglo de Lens-Liévin à Lens. Escortée par les adhérents de l'association Eau Secours 62 et fervents militants pour la gestion de l'eau potable en régie de service publique, Anne Le Strat, conseillère municipale de Paris et présidente d'Eau de Paris, se fraye un passage. Un comité d'accueil de syndicalistes de la CGT Veolia est là. Intimidée ? Pas le moins du monde. Anne Le Strat en est convaincue : « J'ai suffisamment d'arguments à faire valoir. »

L'usager au coeurdu service

Depuis dix-huit mois, Paris a choisi de revenir à la régie pour la gestion de l'eau. « Cette grande réforme du service publique de l'eau s'est faite en un an et demi. Paris avait trois délégataires, avec des fins de contrats différents. Le contexte était très dur et complexe. Alors je ne dis pas que c'est simple, mais que c'est possible. » Et que « ça marche ! ».

Alors le message qu'elle est venue défendre devant les élus, associations et syndicalistes est limpide. Clair comme de l'eau de roche. En gros : pour la gestion de l'eau du robinet, revenir à une régie publique s'avère « plus efficace », « plus transparent » et « plus démocratique » qu'une gestion privée confiée à de grandes multinationales.

La meilleure façon de baisser les prix serait de revenir en gestion publique. La preuve ? Un peu plus d'un an après avoir écarté Veolia et Suez du marché de l'eau, « le prix de l'eau va baisser de 8 % au mois de juillet ». Une première baisse depuis plus de 25 ans de hausse continue... Autre constat : « Grâce à la régie, nous avons réalisé trente-cinq millions d'euros de gains par rapport à l'ancienne délégation au privé », rapporte-t-elle. Avant d'ajouter : « Paris est la première collectivité à rendre effectif le droit à l'eau . » Grâce à la régie, la capitale entend désormais mener une politique d'aide sociale à l'eau.

Alors exit Veolia, opérateur privé qui règne sur le marché de l'eau à la Communauté d'agglo ? La gestion de l'eau passera-t-elle dans le giron de la CALL ? Pas si sûr. Il faudra encore convaincre les réticents. Et faire adhérer les élus.

Du côté des réfractaires, il y a les syndicalistes CGT de Veolia. « On nous propose deux scénarios : rester sur la délégation de service publique ou passer en régie. Nous, on en propose un troisième : le service public national de l'eau avec un statut unique des salariés de l'eau , explique Dominique Poly, secrétaire général CGT Veolia Flandres - Artois - Picardie. Il faut donner une dimension nationale à cette question de l'eau. »

Que défend la CGT ? Les intérêts privés des salariés de Veolia ou l'intérêt public des citoyens de la région ? On peut comprendre et admettre qu'ils ne veuillent pas lâcher la proie pour l'ombre. Il est inadmissible, par contre, qu'ils soient les agents d'une politique de privatisation au service d'une entreprise qui entend dominer "le marché" de l'eau ! Quant au troisième scénario (" le service public national de l'eau avec un statut unique des salariés de l'eau"), qu'est-ce que cela veut dire ? Ou il s'agit de mots creux ou il s'agit de la nationalisation du service de l'eau ! Mais alors, sous quel régime local ? AGLEAU

mardi 29 mars 2011

Prix de l’eau : l'opération transparence

Une adhérente d'AGLEAU , attire notre attention sur cet article effectivement remarquable ! AGLEAU
Eau: consommateurs, à vos factures!

Combien payez-vous pour l’eau potable ? Si vous avez une maison individuelle, vous pouvez ressortir la facture d’eau que l’on vous envoie une fois par an. Mais pour les 44% de Français habitant dans un appartement, la réponse est autrement plus difficile à trouver. En l’absence de compteurs individuels, il faut demander au syndicat de copropriété de présenter la facture adressée à l’immeuble. Un véritable parcours du combattant, qui n’incite pas vraiment à réduire sa consommation pour faire des économies.

En effet, le coût de l’eau explose depuis les années 1970. Rien que depuis 1990, il a quasiment été multiplié par trois, quand l’inflation n’a atteint que 50%.

Déficit d’information

Par ailleurs, l’information concernant les coûts est morcelée. L’acheminement de l’eau est un service géré par les communes, si bien qu’aucune structure centralisée et publique ne recense les informations. Impossible alors de savoir si l’eau est plus chère dans ma commune que chez le voisin. Pas facile, dans ces conditions, d’évaluer correctement les compétences de la régie responsable du service public de l’eau.

Déjà en 2001, un rapport parlementaire arrivait à la conclusion que « la jungle des prix [était] inacceptable ». Depuis, un Observatoire National de l’Eau a été lancé. Son rôle, définit par le gouvernement en 2009, est de créer une fiche d’identité des services de l’eau pour chaque territoire. Volume des fuites, prix des services, qualité de l’assainissement… L’observatoire est chargé de collecter 40 points de données par commune, en les demandant aux maires.

Pourtant, deux ans après sa création, seules 3% des communes – représentant 30% de la population – ont joué le jeu. Les contre-incitations sont en effet nombreuses pour les maires. Les informations sont parfois entre les mains des délégataires du service public de l’eau (Suez, Veolia etc.), qui refusent de les transmettre. Certains maires agriculteurs peuvent aussi refuser de communiquer les données sur la qualité d’une eau qu’ils savent polluée.

Crowdsourcing citoyen

Pour contourner ces obstacles, la Fondation France Libertés et 60 Millions de Consommateurs, en partenariat avec OWNI, lancent l’Opération Transparence. Ce crowdsourcing vise à collecter, via les utilisateurs directement, les données manquantes.

L’interface permet d’envoyer sa facture d’eau et de saisir les informations qu’elle contient. Cela permettra de collecter des informations auprès, potentiellement, des 36 millions de Français en maison individuelle. Les autres peuvent demander la facture à leur syndic ou directement à leur mairie les informations qu’elle détient.

La validité des contributions est garantie par un système de vérification collaborative. Chaque contribution doit être validée par un membre dont la contribution a déjà été validée pour être acceptée dans la base de données. Sans modération centralisée, le système est ainsi capable de monter rapidement en puissance.

La CADA à la rescousse

La principale innovation de ce crowdsourcing citoyen tient à la possibilité pour les internautes de demander directement un avis à la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) en cas de non-réponse des mairies. En effet, en cas de refus d’une administration de fournir des informations publiques, tout citoyen peut saisir cette commission, qui rend alors un avis donnant raison au demandeur ou à l’administration.

L’Opération Transparence sera le premier essai d’une saisie à grande échelle de la CADA autour d’un problème précis. Cette initiative contribuera à une plus grande connaissance de cette administration inconnue du grand public (5 fois moins connue que la CNIL, par exemple) et délaissée par les pouvoirs publics. Son budget d’un seul million d’euros par an place la France à la dernière place européenne en termes de ressources par habitants dévolues à l’ouverture des données publiques.

Les données collectées seront présentées au Forum mondial de l’eau de Marseille le 22 mars 2012.

Rendez-vous sur prixdeleau.fr pour contribuer à cet effort qui améliorera l’information sur le marché de l’eau, poussant le rapport qualité/prix vers le haut, et qui ouvrira les données publiques à une échelle encore jamais réalisée en France.

http://owni.fr/2011/03/22/prix-de-l-eau-crowdsourcing/ 

mardi 22 mars 2011

Journée mondiale de l'eau 2011

La journée internationale de l'eau est une initiative née de la conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement qui a eu lieu en 1992 à Rio de Janeiro au Brésil lors de l'établissement du fameux Agenda 21 pour la Terre. La gestion de l'eau est bien sûr présente dans cet agenda 21.

Les nations unies ont désigné le 22 mars comme le jour qui célèbre dans le monde entier la journée mondiale de l'eau. La première journée mondiale de l'eau a été observée en 1993. Cette journée est l'occasion pour les états de mettre en place les recommandations des Nations Unies, et des actions adaptées au contexte national de chaque pays.

Point de vue

L'eau insalubre tue

Les conflits en Libye et en Côte-d'Ivoire, le tsunami au Japon et le tremblement de terre en Haïti toujours présent dans nos mémoires. La compassion mondiale est à juste titre mobilisée et l'action humanitaire déployée. 950 désastres ont fait 295 000 morts en 2010 et 97 milliards de dollars de dégâts, selon le réassureur allemand Munich Re. Et que dire de la guerre en Afghanistan qui coûterait 120 milliards de dollars chaque année aux Etats-Unis !

Il est pourtant une autre catastrophe, voire même une véritable guerre contre des innocents, qui fait des ravages et qui mobilise si peu médias, opinion publique et responsables politiques. il est urgent de le rappeler au moment ou l'on célèbre dans la plus grande discrétion la journée mondiale de l'eau.

En effet, l'eau insalubre provoquerait, selon les estimations les plus récentes, 3,6 millions de victimes chaque année ! Cette mortalité a bien une cause identifiée, les maladies hydriques, notamment le choléra, la typhoïde, les hépatites et la diarrhée qui à elle seule tue 1,5 million d'enfants chaque année dans le monde.

Mais il ne s'agit que d'une hécatombe silencieuse. Faut-il du spectaculaire, de la gesticulation diplomatique ou militaire et le journal télévisé pour que soient prises les décisions indispensables pour faire reculer ce qui est probablement la première cause de mortalité au monde ?

Le constat est simple et triste. Les ressources comme la volonté manquent pour cette urgence humanitaire qui concerne des centaines de millions, sinon des milliards d'êtres humains. Les Nations unies nous disent qu'il y a encore 885 millions de personnes qui n'ont pas accès à une source d'eau améliorée. Ce n'est pas faux, mais il faut compter autrement. Il y a surtout 3 milliards de personnes qui n'ont pas accès à un robinet chez elles ou à proximité et l'eau qu'elles boivent est de qualité inégale, voire douteuse. En outre, Il y a 2,5 milliards de personnes qui n'ont pas accès à l'assainissement et elles seront même 2,7 milliards en 2015 au moment ou l'on fera le bilan des Objectifs de développement du millénaire des Nations unies !

Selon l'Organisation mondiale de la santé, pour atteindre ses objectifs en matière d'eau et d'assainissement, il faudrait mobiliser 18 milliards de dollars chaque année, là ou en 2008, selon l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), la communauté internationale en a réunie 7,4 milliards dont 3,5 en prêt et 3,9 en don ! Force est de constater, malgré des progrès réels dans des pays comme l'Inde et la Chine, que ce fléau n'est pas traité au niveau requis et qu'il ne l'est pas non plus de la meilleure manière possible, tout particulièrement en Afrique sub-saharienne.

Ainsi, il n'y aurait pas moins de vingt-huit agences des Nations unies en charge de cette question ! L'eau et l'assainissement ne constituent qu'un sous-objectif du développement du millénaire ! Si la France est le cinquième bailleur international dans ce domaine et si elle a augmenté de manière significative sa contribution ces dernières années, environ 75 % de ses efforts sont concentrés dans quelques pays émergents et solvables par des prêts pour des installations en zone urbaine alors que la part des dons pour les populations les plus en danger s'est littéralement effondrée en 2009.

Pourtant, l'association humanitaire "Solidarités International", comme tous les autres acteurs compétents, peut affirmer que ce n'est ni une fatalité, ni un problème technique et que l'on peut faire énormément avec assez peu, y compris dans les situations les plus difficiles. Que l'on en juge. Dans une action d'urgence à Port-au-Prince auprès des déplacés, l'eau potable, l'assainissement et des produits d'hygiène ont été apportés à 55 000 personnes pour un budget de 14,5 dollars par personne et les installations ont été ensuite transférées aux communautés locales. C'est ainsi qu'avec ce type de programme, du savon, du clore et en lien avec les associations médicales, nous avons pu lutter contre l'épidémie de choléra.

En République démocratique du Congo, en partenariat avec les acteurs locaux, sur une période de huit ans, une eau potable et durable a été apportée à 190 000 habitants de la ville de Béni, au Nord-Kivu à l'Est, pour un coût de 40 dollars par personne. Programme qui a ainsi contribué à réduire les maladies hydriques, le coût de la santé pour les familles, la durée de la corvée d'eau et ainsi à faciliter l'éducation des enfants et l'essor des activités génératrices de revenus pour les femmes ainsi qu'à améliorer leur sécurité physique. On sait d'ailleurs que chaque dollar investi dans ce domaine génère l'équivalent de 4 et 12 dollars de ressources pour ces populations.

Nous sommes aujourd'hui à un moment clef pour qu'une prise de conscience et une mobilisation digne de ce nom se manifestent. La population mondiale aura quintuplé entre 1900 et 2025 et les prélèvements en eau se seront multipliés par neuf ! 95 % de la croissance démographique d'ici 2050 se produira dans des pays en développement. Dans ses pays, 80 % des eaux usées sont rejetées sans traitement, provoquant une pollution dangereuse pour l'homme. La quantité d'eau disponible par habitant diminue tandis que le nombre de personnes qui souffrent du manque d'eau augmente. On estime même que dès 2025, 22 % de l'humanité vivra dans des régions de "grande pénurie". Pour le programme des Nations unies pour le développement (PNUD), 90 % de nos voisins du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord seront touchés !

Nous sommes à un moment clef parce que la France accueillera en mars 2012 le 6e Forum mondial de l'eau à Marseille qui est le siège du Conseil mondial de l'eau qui l'organise. Ce Forum, qui a été placé sous le signe des solutions, accueillera des dizaines de milliers de participants dont tous les acteurs de l'eau dans le monde. Pour être à la hauteur des enjeux et des espoirs, ce forum doit être celui des engagements. Après le vote, en juillet 2010, d'une résolution des Nations unies faisant de l'accès à l'eau potable un droit humain, le forum doit donc apporter des solutions, car il n'y a pas de droit réel sans accès concret à l'eau potable et à l'assainissement pour les populations qui en sont dépourvues !

En ayant lancé le 6e Forum mondial de l'eau, le 2 juin à l'Elysée, le président de la République nous a déclaré qu'il en ferait une priorité du G8 et du G20 pour lutter contre la première cause de mortalité dans le monde. Il s'agit maintenant de remplir ses engagements. C'est simplement une question de vie ou de mort pour beaucoup d'innocents. C'est simplement une immense cause humanitaire.

Alain Boinet, directeur général et fondateur de Solidarités international



Si la quantité d'eau sur Terre est toujours constante, sa qualité décroît avec l'usage qu'on en fait. Ainsi, la qualité des ressources en eau est de plus en plus menacée par les pollutions. Le problème est plus grave encore dans les pays en développement où plus de 90 % des eaux d'égout et 70 % des déchets industriels non traités sont déversés dans les eaux superficielles... Cette pollution sans précédent des ressources hydrologiques est imputable à l'activité humaine des 50 dernières années.

La Journée Mondiale de l'Eau 2011

L'objectif de la Journée Mondiale de l'Eau 2011 est d'attirer l'attention internationale sur les impacts de cette croissance urbaine rapide, de l'industrialisation et des incertitudes liées au changement climatique, aux conflits et aux catastrophes naturelles, sur les réseaux d'eau urbains.

Chaque année, la Journée mondiale de l'eau met en lumière un aspect spécifique de l'eau douce. A l'occasion de cette nouvelle journée, le thème retenu est « de l'eau pour les villes : répondre au défi urbain. » (Water for Cities: Responding to the Urban Challenge). Il a pour objet de mobiliser et d'encourager les gouvernements, les organisations, les communautés et les individus à s'engager activement pour relever le défi de la gestion urbaine de l'eau.

"Water Makes Money" : le business de la gestion de l'eau en accusation

La gestion de l'eau fait l'objet d'un business aux enjeux financiers colossaux. Le documentaire Water Makes Money, réalisé par Leslie Franke et Herdolor Lorenz, programmé sur Arte mardi 22 mars, à 20h40, dans une soirée "Thema" intitulée "Marchands d'eau" (et qui sort en salles mercredi), nous emmène au cœur des manœuvres des multinationales contrôlant cette filière.

Les puissants groupes Veolia et Suez se sont vus déléguer, à 80 %, la gestion de l'approvisionnement en eau dans l'Hexagone. Résultat : le consommateur se retrouve soumis à des intérêts privés, qui ne concernent ni sa santé ni l'avenir de la planète.

Le film démontre comment les grandes compagnies ont impunément haussé le tarif de l'eau potable. Il a fallu l'acharnement d'un expert-comptable pour mettre au jour les combines qui ont amené les habitants de certaines communes, notamment Bordeaux, à payer leur eau de 30 % à 40 % plus cher qu'ailleurs. Des bénéfices qui ne sont que rarement réinvestis dans l'entretien ou l'assainissement.

Leslie Franke et Herdolor Lorenz ont notamment rencontré un dissident de Veolia, Jean-Luc Touly. Ce syndicaliste, congédié puis réintégré par son entreprise, est l'auteur de livres brûlants, qui lui ont valu une flopée de procès. Le film étaye ses affirmations : les pratiques de pots-de-vin pour obtenir les marchés, les accointances coupables avec la sphère publique…

Ce film dérangeant a été financé pour moitié par des contributions privées, récoltées grâce à une souscription lancée sur Internet. Aujourd'hui, il fait l'objet d'une attaque en diffamation par Veolia.

mardi 8 mars 2011

L'eau sacrifiée par l'agriculture industrielle


À l'occasion du dernier Salon de l'Agriculture, le WWF-France a mis en ligne une série de trois enquêtes de terrain

Ces films d'une durée de 15 minutes, tournés en juin 2009 en Bretagne et de mai à septembre 2010 dans le Gers et l'Eure-et-Loir, pointent l'engrenage productiviste et industriel dans lequel l'agriculture française s'est enfermée au détriment du développement des territoires, de la qualité de leur environnement mais aussi, et surtout, des agriculteurs eux-mêmes. Refusant la dénonciation et la stigmatisation, ces films sont avant tout des témoignages de terrain montrant que dès à présent des solutions existent, créatrices de mieux-être et d’emploi pour sortir de ce cercle vicieux. En effet, l’agriculture de demain ne pourra se faire qu’en prenant en compte la préservation de l’environnement et le retour aux valeurs paysannes.



Film 1 / Eure-et-Loir : du poison dans l’eau – La France, est le 3ème pays consommateur de pesticides au monde en volume, avec plus de 70 000 tonnes annuelles répandues sur nos terres dont 90% pour l’agriculture. Ces composés chimiques ont des impacts directs sur l’environnement : absorption végétale, rétention, dégradation, percolation, volatilisation, ruissellement… autant d’actions de ces molécules qui impactent le cycle de l’eau. Le département de l’Eure-et-Loir est un cas emblématique de cette utilisation irraisonnée d’intrants chimiques.


Film 2 / Gers : un maïs arrosé d’argent public – Le Gers, haut lieu de la gastronomie française avec son foie gras et son armagnac donne l’image de ces petits coins de campagne, symbolisée par le film de Chatillez "Le bonheur est dans le pré". On ne peut imaginer qu’à quelques kilomètres de là un enjeu écologique majeur se joue. 25 % de la surface agricole utile est dédiée à la culture du maïs, une céréale très consommatrice d’eau. Par une culture inconsidérée du maïs, la ressource en eau de ce territoire se trouve très fortement impactée et menacée.


Film 3 / Bretagne : le raz de marée des algues vertes
– En France, la contribution des nitrates dans la pollution des eaux souterraines et superficielles ne cesse d’augmenter. Selon l’IFEN, depuis 1990, la qualité des cours d’eau s’est encore dégradée pour atteindre 20 % d’état médiocre ou mauvaise. 66% des nitrates de nos eaux continentales proviennent de l’épandage massif d’engrais azotés et de lisiers par les agriculteurs. Dans le département des Côtes d’Armor, la situation devient dramatique sur le littoral avec la multiplication des algues vertes.





mercredi 23 février 2011

La protection des nappes phréatiques : une lutte politique

Il y a de l’eau partout… mais peut-on en boire?

Barbara Sherwood Lollar,

« Depuis quelques générations, la nappe phréatique est très polluée partout dans le monde, ce qui a un impact néfaste sur les réserves d’eau potable », a indiqué Barbara Sherwood Lollar, titulaire de la chaire de recherche du Canada en géochimie des isotopes de la Terre et de l’environnement de l’University of Toronto.

D’ailleurs, la chercheure a présenté ses travaux de recherche, qui étudie des initiatives sociales visant à inverser et à éliminer le processus de pollution de la nappe phréatique, à l’occasion du déjeuner de presse PENSEZ CANADA organisé dans le cadre de l’assemblée annuelle de 2011 de l’American Association for the Advancement of Science (AAAS). Elle a également parlé de ses travaux sur l’efficacité de technologies de biorestauration, qui font appel à des microbes afin purifier des contaminants organiques tels que les hydrocarbures pétroliers (le pétrole, l’essence ou le diesel) ou des produits chimiques utilisés au sein de l’industrie de l’électronique ou du transport.

Même si l’élimination de ces contaminants semble assez bien réglementée de nos jours, cela n’a pas toujours été le cas. Ainsi, immédiatement après la Seconde Guerre mondiale, le laxisme des règlements et de leur mise en application a légué à l’Europe et à l’Amérique du Nord un héritage de contamination. « Cette contamination a eu un effet néfaste sur l’environnement, a indiqué la chercheure. Elle est toujours présente, et il faut s’en occuper. »

Au cours de la dernière décennie, de nombreuses techniques utilisées pour purifier la nappe phréatique ont fait appel à la microbiologie et aux travaux de géochimistes comme Mme Sherwood Lollar. « L’être humain n’est pas conçu comme les microbes sur le plan génétique, a-t-elle expliqué. Dans de nombreux cas, les microbes présents à l’état naturel se nourrissent de contaminants organiques et les convertissent ainsi en produits finaux non toxiques. »

Jusqu’à maintenant, la plus grande difficulté consistait à prouver que ce processus existe et que les microbes purifient vraiment les contaminants. Mme Sherwood Lollar a donc élaboré des techniques qui permettent de savoir où se produit cette purification et, ce qui est tout aussi important, où elle ne se produit pas.

« Des éléments tels que le carbone comportent des isotopes stables différents, soit le carbone 12 et le carbone 13. L’un est un peu plus lourd que l’autre, et les microbes ont tendance à se nourrir surtout du plus léger des deux. Lorsque ces microbes ont opéré pendant un certain temps, la proportion de carbone lourd et de carbone léger change. C’est ce changement – que l’on appelle « signature isotopique » – qui permet de savoir si de l’eau a été purifiée », a précisé la chercheure.

En purifiant la nappe phréatique contaminée, il est possible de récupérer ce qui serait autrement une ressource perdue. Les organes de réglementation commencent à utiliser cette technique, et Mme Sherwood Lollar collabore avec un groupe international de scientifiques afin de préparer un document d’orientation pour l’Environmental Protection Agency (EPA) des États-Unis. Ce document comportera un ensemble de recommandations liées à l’utilisation de la technique sur le terrain, ce qui représentera une première étape de l’intégration de celle-ci.

« On pense souvent, à tort, que l’eau – en particulier les réserves de la nappe phréatique – constitue une ressource renouvelable, a indiqué la chercheure. Pourtant, ce n’est pas le cas, donc il est particulièrement important de gérer cette ressource efficacement et de faire tout ce qui est possible afin de conserver, de protéger et de restaurer les réserves dont on dispose. »

Cet article a été publié par Michaël Adams dans Canadian Researchers, Think Canada.

mercredi 16 février 2011

Le Forum Social Mondial se saisit de la politique de l'eau

APPEL DE DAKAR

POUR LE FORUM ALTERNATIF MONDIAL DE L’EAU

A MARSEILLE EN MARS 2012


En juillet 2010, la reconnaissance par les Nations Unies de l’accès à l’eau pour tous comme un droit humain fondamental a constitué une consécration historique pour les luttes menées depuis des années par les mouvements sociaux, les citoyens, les peuples autochtones, les élus, à travers le monde.

En novembre 2010 était lancé l’appel de Marseille, qui constituait une première étape du projet de Forum Alternatif Mondial de l’Eau (FAME) porté par les citoyens et les mouvements sociaux.

Aujourd’hui, cet appel s’est enrichi des apports des organisations de tous les continents, présentes au Forum Social Mondial de Dakar.


  • Une nouvelle étape s'ouvre, celle de la reconnaissance de l'eau comme bien commun, source de vie. Le droit à l'eau et à l'assainissement doit devenir contraignant et effectif.

  • Le Conseil mondial de l’Eau, auto-désigné, et son Forum n’ont aucune légitimité, ni politique -ils ne représentent pas les peuples du monde- ni technique -leur bilan est un échec au regard des objectifs déclarés. Pour eux, l'eau est une marchandise, source de profits.

  • Nous, associations, mouvements sociaux et autorités locales, porteurs d’expériences alternatives, sommes légitimes pour proposer des voies rendant effectif, au niveau des territoires et des pays, le droit à l’eau et à l'assainissement pour tous.

  • Le Forum Alternatif Mondial de l’Eau offrira une plate-forme d’expression et de convergence de l’ensemble des luttes, des expériences et des réalisations menées dans la perspective d’un droit effectif à l’eau et à l'assainissement, garanti par une gestion publique et participative, démocratique et transparente, sociale et écologique. De cette expression devront sortir des lignes d’actions pour l’avenir, à tous les niveaux d’élaboration et de mise en œuvre des politiques de l’eau et de l’assainissement.

  • Le FAME œuvrera à la consolidation et à l'élargissement des réseaux de territoires et d’élus pour porter ces exigences dans l'agenda politique à tous les niveaux.

Nous appelons les associations, organisations de femmes, ONG, syndicats, élus et autorités locales et les citoyens du monde à participer au FAME pour faire entendre la voix des peuples à Marseille en mars 2012.

Appel signé des organisations présentes ce jour, 10 février 2011, au Forum Social Mondial de Dakar.


www.fame2012.org


mercredi 9 février 2011

Le Forum mondial de l’eau : une privatisation mondialisée



Un Forum mondial de l’eau (FME) se tient tous les trois ans : le dernier était à Istanbul en 2009, le prochain sera à Marseille en mars 2012. L’initiative en revient au Conseil mondial de l’eau qui regroupe multinationales et Etats les plus puissants. Son président est le Français Loïc Fauchon, PDG de la Société des eaux de Marseille, filiale de VEOLIA. Créé en 1995, le Conseil mondial de l’eau se veut « la voix de l’eau », c’est-à-dire qu’il élabore un discours de l’eau au niveau global. Que l’eau devienne un sujet politique majeur à l’échelle du monde est tout à fait souhaitable. Là où le bât blesse, c’est que cette tâche devrait revenir à une institution internationale placée sous l’égide de l’ONU, pas à un groupe privé. C’est un peu comme si à la place du conseil de sécurité de l’ONU, il y avait une assemblée de marchands d’armes et d’Etats, présidée par M. Dassault. De fait, cela dépasse de très loin le lobbying « ordinaire »: la politique est privatisée ! Sous la houlette des entreprises, le Forum mondial de l’eau mobilise et influe sur les décideurs politiques à tous les niveaux et se conclut par une déclaration des ministres ou des chefs d’Etat qui donne la feuille de route pour les prochaines années. Les 20 000 participants attendus à Marseille seront pour l’essentiel des élus, des fonctionnaires et des dirigeants d’entreprises publiques !

Mais tout cela ne va pas comme un long fleuve tranquille. Il se pourrait que des turbulences surgissent en mars 2012 à Marseille ou même avant. En juillet 2010 s’est produit un événement majeur : à l’initiative de la Bolivie, l’assemblée générale des Nations Unies a reconnu le droit à l’eau potable et à l’assainissement. C’est la consécration historique du combat mené depuis de nombreuses années, par des associations, des citoyens et des élus, mais pas …par le Conseil mondial de l’eau ! A Istanbul, en 2009, une vingtaine de pays avaient publié, en marge du Forum mondial de l’eau, une déclaration en faveur de la reconnaissance du droit à l’eau que le Forum n’avait pas retenu. Du coup, dans sa préparation, le Forum mondial de l’eau est gêné aux entournures et évoque à peine cette question qui est pourtant essentielle dans la définition d’une politique mondiale de l’eau. Et si le FME joue aux abonnés absents sur un point aussi crucial, sa crédibilité politique de « voix de l’eau » est sérieusement mise en doute ! D’autant que le droit à l’eau continue à faire son chemin : une résolution a été adoptée par le Conseil des droits de l’Homme en octobre 2010 qui insiste sur la responsabilité des Etats. On pourrait imaginer que la principale manifestation internationale dans le domaine de l’eau célèbre cette reconnaissance historique et s’en serve pour impulser un nouvel élan mondial en faveur de l’accès à l’eau de tous. Ce n’est malheureusement pas la voie choisie pour le FME à Marseille. Il se présente comme « un forum des solutions », sous-entendu de terrain, par opposition aux grands discours. Ce qui, au passage, évite de faire un bilan des multiples déclarations et engagements pris par les cinq Forums précédents qui n’ont pas apporté de remède, bien au contraire, à une crise mondiale de l’eau qui ne fait que s’aggraver. Et ses « solutions » sont étroitement conçues du point de vue des entreprises. Un exemple, une des douze priorités d’action est « harmoniser l’énergie et l’eau ». En soi, ce sujet est d’une actualité brûlante, que l’on songe à l’exploitation des gaz de schistes qui pollue massivement les nappes souterraines et contamine l’eau potable ou au rapprochement entre GDF et Suez d’une part, VEOLIA et EDF d’autre part, qui concentre dans les mêmes mains différents usages de l’eau et laisse perplexe sur les futurs arbitrages… Mais, vous n’y êtes pas, « harmoniser l’eau et l’énergie », signifie pour le FME un objectif final (certes louable) de …« réduire la consommation énergétique des services des eaux » ! C’est vraiment le petit bout de la lorgnette. Peut mieux faire…

Outre ce cap incertain, le FME va rencontrer des turbulences en approchant du port (de Marseille). Ainsi la Fondation France Libertés dénonce un conflit d’intérêts entre les fonctions de Loïc Fauchon, à la fois président du FME et PDG de la Société des eaux de Marseille (SEM), filiale de VEOLIA, mettant en doute au travers du cas de Constantine, sa capacité « d’assumer la promotion de l’eau comme bien commun, tout en multipliant marchés et profits pour sa société » (http://www.france-libertes.org/Veolia-et-Loic-Fauchon-en.html). Et elle l’appelle (par une pétition en ligne : http://www.france-libertes.org/J-appelle-Monsieur-Loic-Fauchon-a.html) à démissionner!

C’est que la SEM apparaît dans ce dossier sous un jour peu flatteur, plus près de la prédation que de la mise à disposition de compétences. A titre personnel, M Fauchon, ancien maire de Trets, ancien bras droit de Gaston Deferre et de Robert Vigouroux, incarne la collusion entre le monde politique et celui des entreprises, si prégnante dans le domaine de l’eau (voir l’article de « Marsactu » http://www.marsactu.fr/2010/06/17/loic-fauchon-empereur-des-eaux-de-marseille-lhumaniste-incompris/). Ce qui n’est pas forcément un gage de sérénité pour le FME, à quelques mois d’élections municipales très disputées entre la droite et la gauche et au sein de chaque formation et à quelques semaines …des élections présidentielles ! En 2007, on se souvient que M. Proglio, alors PDG de VEOLIA, était au Fouquet’s pour fêter l’élection de M. Sarkozy. Mais le climat actuel n’est plus à de telles démonstrations ! Enfin, il y a toutes les « affaires » marseillaises, en particulier le marché des déchets : la société Bronzo qui a défrayé la chronique est une filiale à 100% de la SEM ! Ce qui fait dire à certains que tenir un Forum mondial de l’eau à Marseille, c’est comme tenir un Forum mondial des déchets à Naples ! Et les ennuis ne sont pas finis car le FME risque de rencontrer bientôt sur sa route le Forum alternatif mondial de l’eau (FAME) -lire http://eauidf.blogspot.com/2011/01/ecoutez-les-voix-de-leau.html

Jean-Claude Oliva
Président de la Coordination EAU Île-de-France