Pour une gestion publique de l'eau à laquelle les usagers-citoyens puissent comprendre quelque chose...

vendredi 24 septembre 2010

La controverse commence...

Haro sur les multinationales de l'eau

"Water makes money" décortique le système de la délégation du service public de l'eau à des multinationales privées, comme Suez et Veolia en France.

L'Express publie l'article ci-dessous. Il met en évidence le vif intérêt et les insuffisances aussi du film. Mais ce qui manque n'invalide pas ce qui est amené ! D'autres films complèteront, le moment venu... AGLEAU


Film à charge contre les groupes privés spécialistes de la gestion de l'eau, "Water makes money" sort ce jeudi en Europe. Principalement tourné en France, il vise directement le groupe Veolia. Décryptage.

Jeudi soir, dans une centaine de cinémas associatifs en France, est projeté Water makes money : un documentaire allemand au titre anglais qui nous parle de la distribution de l'eau en France (vive la mondialisation...). Des mouvements comme Attac, la Fondation France Libertés de Danielle Mitterrand ou encore la Coordination Eau Ile-de-France se sont mobilisés à la fois pour financer et diffuser ce film, qui milite clairement pour un retour à une gestion publique de l'eau.

Réalisé par Leslie Franke et Herdolor Lorenz, déjà auteurs en 2005 de "Eau service public à vendre", qui portait surtout sur des exemples britanniques et allemands, ce nouveau film, tout aussi engagé, se consacre cette fois-ci largement aux villes tricolores, avec quelques détours outre-Rhin et outre-Atlantique. Les deux réalisateurs allemands, qui travaillent depuis des années pour ZDF ou encore Arte, s'étaient déjà illustrés avec un film contre la privatisation du rail. L'objectif de Water makes money ? "Décortiquer le système de la délégation de service public", explique Jean-Claude Oliva, président de la Coordination Eau Ile-de-France. Impossible toutefois de voir le film avant sa sortie officielle... par crainte, selon le diffuseur français La Mare aux canards, d'une manoeuvre de Veolia ou Suez pour le faire interdire. Il fallait donc se rendre hier soir jusqu'à Louviers, en Haute-Normandie, pour le découvrir en avant-première nationale.... Ou attendre le DVD transmis ce jour à la rédaction.

En guise de fil rouge du film, un homme : Jean-Luc Touly, ex-cadre et syndicaliste de Veolia pendant 30 ans, licencié en 2006 pour avoir publié des ouvrages dénonçant les scandales de l'eau, désormais bras droit de Danielle Mitterrand à la Fondation France Libertés... et tout juste réintégré dans le groupe par une décision de justice après des années de procédure. Touly ouvre le film, devant le siège parisien de Veolia Environnement, brandissant l'un de ses livres, L'eau des multinationales. Il le clot, devant l'Assemblée nationale, en affirmant : "Le retour au service public de l'eau est possible." Dommage que les réalisateurs n'aient pas assumé le choix de ce fil rouge jusqu'au bout, en nous racontant l'histoire du combat de Touly, ses motivations, ses découvertes et ses éventuelles zones d'ombre.

Au lieu de cela, ils nous baladent de Paris à Toulouse, en passant par Grenoble et Bordeaux, en brassant affaires récentes -renouvellement en 2010 du contrat du Sedif au profit de Veolia- et anciennes -privatisation de l'eau à Grenoble par Alain Carignon au profit de Lyonnaise des Eaux-, en sautant d'un sujet complexe à l'autre: le prix puis la qualité de l'eau. En ignorant un acteur important du marché, le n°3, la Saur. En oubliant que si Paris est revenu à une gestion publique de l'eau début 2010, des activités comme la relation avec les clients sont toujours confiées à des groupes privés, en l'occurence Lyonnaise des Eaux-Suez, pour cinq ans. En suscitant la colère d'un des meilleurs connaisseurs du sujet, l'ancien journaliste Marc Laimé, auteur du blog eaux glacées et interviewé dans le film.

"L'eau nécessite de l'argent"

Le plus souvent, c'est Veolia qui est pointé du doigt. Mais le groupe affirme ne pas avoir été sollicité par les réalisateurs pour répondre à leurs questions. En revanche, Suez, interrogé, a accepté de jouer le jeu et envoyé sa directrice du développement durable au charbon. Celle-ci s'en sort au final par une pirouette habile : "Wasser braucht geld" (l'eau nécessite de l'argent) et non pas "water makes money" (l'eau produit de l'argent) lance la jeune femme à la caméra. Mais les enjeux et questions posés par le film dépassent largement sa seule compétence. On aurait aimé entendre les grands patrons de l'eau sur le sujet : conflits d'intérêt, lobbying effréné, corruption, les accusations sont graves.

Chacun sait que le secteur a encore du chemin à faire avant d'être aussi clair que l'eau qu'il nous sert au robinet. Pas sûr que ce film y contribue réellement. En revanche, il est évidemment un outil pour mobiliser les citoyens à deux ans du Forum mondial de l'eau qui se tiendra à Marseille et des élections présidentielles. Comme le rappelle Touly en épilogue : "Les deux-tiers des contrats français de délégation de service public arrivent à échéance dans les quatre ans." Comprenez : la guerre est ouverte. Partisans de la gestion publique et entreprises privées vont s'affronter sans pitié.

http://www.lexpress.fr/actualite/economie/haro-sur-les-multinationales-de-l-eau_922044.html

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